Sans se troubler, avec l’ardeur d’un courage nouveau, Louise répondit :
— Il aime sa patrie… je n’ai pu lui faire aimer la mienne… n’ai-je pas le droit, à mon tour, de revenir à mon premier devoir ?…
La servante hocha la tête.
— Et Wilhelm ? dit-elle lentement.
— Wilhelm…
Louise s’arrêta court. Un froid la glaça tandis qu’une voix intérieure lui criait : « Il faut qu’une mère ait la même patrie que son fils ». L’abîme lui parut insondable… Oui… pensa-t-elle, ce sont les mères qui forment les cœurs, et comment peuvent-elles inculquer un sentiment qu’elles n’éprouvent pas ?
La réponse différée par l’intervention de Fritz n’était qu’ajournée. Elle savait qu’un moment arriverait où Wilhelm ne se laisserait plus distraire et qu’il dirait à sa mère :
— De cette Allemagne, que mon père m’apprend seul à connaître, pourquoi n’en fais-tu pas partie ? et pour cette France, dont tu ne parles jamais, mais que tu portes dans ton cœur, comme une Alsacienne fervente, qu’as-tu fait ?