Page:Focillon - L’Art bouddhique.djvu/17

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savons des coutumes des peuples barbares : j’emploie à dessein cette dernière expression avec le sens large et sans malveillance qu’elle a dans la langue grecque, ne pouvant appeler primitifs et encore moins sauvages des peuples dont les arts révèlent souvent une force secrète, supérieure à l’habileté. Les rites et les croyances qui subsistent chez eux, non à titre de dégénérescence de formules plus élevées, mais comme vestiges inébranlables de l’humanité ancienne, éclairent singulièrement toutes ces questions. En vertu du principe même de la magie sympathique, l’image d’un être ou d’un objet, à la suite d’une incantation ou d’un charme, peut être douée des mêmes qualités et des mêmes attributs que cet être ou cet objet. On s’explique dès lors pourquoi les grottes qui servaient d’abris aux chasseurs de rennes sont décorées d’images gravées et peintes dans l’ombre et sur lesquelles brillait rarement une faible lumière. Que l’art ait été rêvé, puis ébauché par un solitaire génial, désireux d’exprimer et peut-être de faire partager à d’autres son émotion en présence des formes vivantes, c’est là probablement une émouvante fiction romantique. L’homme primitif copia le bison, le mammouth et le renne, non par délassement ou par jeu, mais parce que leur image lui était directement utile et qu’il s’en servait pour se les concilier.

Une pareille interprétation ne serait qu’ingénieuse, si elle n’était confirmée par un grand nombre d’observations faites sur le fétichisme et si toutes les religions ne conservaient des traces de cette attitude primitive de l’homme en face des choses. La croyance, encore si vivace, aux sta-