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LA FLEUR-SERPENT

tonnerre, le vent soufflait en tempête. Je crus vraiment le ciel déchaîné contre moi et j’eus envie de m’enfuir, pour échapper surtout à cette face terrible, apparue et disparue, et qui dans l’intermittence des lueurs semblait s’agiter.

« J’eus la force de réagir pourtant et je me mis à creuser le sol.

« À quoi bon vous dire toutes les tortures que m’infligea ce labeur ? Sous les torrents de pluie qui m’écrasaient, dans ce tumulte des éléments, sous ce ciel furieux, que le reflet du Vésuve, par moments, empourprait comme une fumée d’incendie ! cette lassitude presque invincible, qui me paralysait ! ce trou qui s’emplissait d’eau ! ce mort regardant, de ses yeux fixes, creuser sa tombe ! je me crus plusieurs fois la proie d’un épouvantable cauchemar et je souhaitais que des flots de lave vinssent ensevelir, avec tout souvenir, la victime et le meurtrier !

« Quand tout fut fini, le jour commençait à poindre et l’orage s’éteignait. La clarté blafarde du matin me rendit un peu de calme, et me permit d’effacer toute trace du meurtre ; l’orage m’avait servi en amollissant et en ravinant le