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LA TUNIQUE MERVEILLEUSE.

éclairait la pièce, à travers les papiers huilés des fenêtres.

Cœur-de-Rubis gagna le banc d’honneur, et se pelotonna dans un coin ; mais le froid semblait augmenter d’instant en instant, et la souffrance qu’il infligeait au malheureux devenait intolérable. Il lui semblait être plongé dans une eau glacée, ses genoux s’entre-choquaient, il claquait des dents si violemment que, craignant de se les casser, il introduisit deux de ses doigts dans sa bouche.

— « Hélas ! hélas ! murmura-t-il, je n’aurai pas les liangs d’or et je ne m’endormirai pas sur le cœur de ma fiancée, car je vais mourir ici. »

Un engourdissement dangereux s’emparait de lui peu à peu. Tout à coup il se leva et secoua cette torpeur ; il lui était venu une idée. Il se glissa sous la lourde table en bois de fer qui avait servi au repas, et la souleva sur son dos. Ainsi chargé, il se mit à parcourir la chambre d’un pas rapide.

Bientôt son sang se remit à circuler, il sentit la chaleur et la vie revenir peu à peu. Il continua à marcher avec ardeur ; de temps en temps il s’arrêtait pour reprendre haleine, puis repartait. Quand la table le fatiguait trop, il la posait et prenait une