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Page:Gourmont - Muses d’aujourd’hui, 1910, 3e éd.djvu/121

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marie dauguet

…referme sur moi tes tendres bras ouverts ;
Que je presse tes mains en mes brûlantes paumes ;
Tes deux mains de fraîcheur, au fond des soirs déserts…

Pourtant, je ne sais s’il ne perce pas comme un regret dans ce dédain de l'amour humain, un regret de souffrances anciennes dans le paisible bonheur de l'instant :

Le désir torturant devient une caresse
Alors qu’on le perçoit, voguant parmi les choses ;
Leur divine beauté jamais ne nous délaisse ;
Si tu veux des baisers, mais baise donc les roses !

la chair froide et parfumée des roses. Mais l’art est un divin mensonge, une auto-suggestion qui nous permet de nous concevoir autres que nous ne sommes ; par lui, nous dépassons notre instinctive sincérité, nous nous agrandissons de tous les rêves lentement formés par l’imagination de nos ancêtres. L’art est l’expression de l’évolution de la race ; évolution (c’est-à-dire adap-