Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Poésie, tome II.djvu/320

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Une âme selon Dieu sort de toutes ces âmes,
Si, loin des feux, des voix, des bruits et des splendeurs,
Dans un repli perdu parmi les profondeurs,
Sur quatre jeunes fronts groupés près du mur sombre,
Vous voyez se pencher un regard voilé d’ombre
Où se mêle, plus doux encor que solennel,
Le rayon virginal au rayon maternel ;


Oh ! qui que vous soyez, bénissez-la. C’est elle !
La sœur, visible aux yeux, de mon âme immortelle !
Mon orgueil, mon espoir, mon abri, mon recours !
Toit de mes jeunes ans qu’espèrent mes vieux jours !


C’est elle ! la vertu sur ma tête penchée ;
La figure d’albâtre en ma maison cachée ;
L’arbre qui, sur la route où je marche à pas lourds,
Verse des fruits souvent et de l’ombre toujours ;
La femme dont ma joie est le bonheur suprême ;
Qui, si nous chancelons, ses enfants ou moi-même,
Sans parole sévère et sans regard moqueur,
Les soutient de la main et me soutient du cœur ;
Celle qui, lorsqu’au mal, pensif, je m’abandonne,
Seule peut me punir et seule me pardonne ;
Qui de mes propres torts me console et m’absout ;
A qui j’ai dit : toujours ! et qui m’a dit : partout !
Elle ! tout dans un mot ! c’est dans ma froide brume
Une fleur de beauté que la bonté parfume !
D’une double nature hymen mystérieux !
La fleur est de la terre et le parfum des cieux !