Page:Hugo - La Légende des siècles, 2e série, édition Hetzel, 1877, tome 2.djvu/111

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Lui chevalier, risquant sa part de paradis,
Laissant faire aux soldats des choses de bandits ;
Ils ont enfreint les lois de guerre aragonaises ;
Des enfants ont été jetés dans les fournaises ;
Les noirs effondrements mêlés aux tourbillons
Ont dévoré la ville, on a crié : Pillons !
Et ce meurtre a duré trois jours ; puis don Ascagne,
Vainqueur, a ramené ses gens dans la montagne
Sanglants, riants, joyeux et comptant des profits,
Et c'est pourquoi le père a souffleté le fils.

Alors le fils a dit : — Je m'en vais. L'ombre est faite
Pour les fuites sans fond, et la forêt muette
Est une issue obscure où tout s'évanouit.
L'insulte est une fronde et nous jette à la nuit.
J'ai droit à la colère à mon âge. L'offense,
Tombant du père au fils, est la fin de l'enfance.
Nul ne répond du gouffre, et qui s'en va, va loin.
L'affront du père, ô bois, je vous prends à témoin,
Suffit pour faire entrer le fils en rêverie.
Quoi ! pour avoir senti gronder ma seigneurie
Dans mon âme, devant des manants, pour avoir
Ramené comme il sied des vassaux au devoir,
Pour quelques vils bourgeois brûlés dans leurs masures,
Comte, vous m'avez fait la pire des blessures,
Et l'outrage est venu, seigneur, de vous à moi ;