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Page:Hugo - William Shakespeare, 1864.djvu/241

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hypothèses flottent ; toute la philosophie humaine vacille à un souffle sombre devant cette ouverture.

L’étendue du possible est en quelque sorte sous vos yeux. Le rêve qu’on a en soi, on le retrouve hors de soi. Tout est indistinct. Des blancheurs confuses se meuvent. Sont-ce des âmes ? On aperçoit dans les profondeurs des passages d’archanges vagues, sera-ce un jour des hommes ? Vous vous prenez la tête dans les mains, vous tâchez de voir et de savoir. Vous êtes à la fenêtre dans l’inconnu. De toutes parts les épaisseurs des effets et des causes, amoncelées les unes derrière les autres, vous enveloppent de brume. L’homme qui ne médite pas vit dans l’aveuglement, l’homme qui médite vit dans l’obscurité. Nous n’avons que le choix du noir. Dans ce noir, qui est jusqu’à présent presque toute notre science, l’expérience tâtonne, l’observation guette, la supposition va et vient. Si vous y regardez très-souvent, vous devenez vates. La vaste méditation religieuse s’empare de vous.

Tout homme a en lui son Pathmos. Il est libre d’aller ou de ne point aller sur cet effrayant promontoire de la pensée d’où l’on aperçoit les ténèbres. S’il n’y va point, il reste dans la vie ordinaire, dans la conscience ordinaire, dans la