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EN-NOWEIRI.

une couronne avec l’or et les perles que je possède. » Malgré la répugnance manifestée par Abd-el-Azîz, elle réussit à lui faire porter la couronne. Les musulmans commencèrent alors à soupçonner les intentions de leur chef ; ils disaient ouvertement qu’il s’était fait chrétien, et pénétrant enfin le but qu’il avait en faisant pratiquer la porte basse, ils se jetèrent sur lui et le tuèrent, vers la fin de l’an 97 (août, 716 de J.-C.). Ceci se passa dans les derniers temps du khalife Soleiman-Ibn-Abd-el-Mélek. Pendant toute l’année suivante, ils demeurèrent sans imam pour présider à la prière du vendredi[1]. — L’historien El-Ouakedi nous a transmis la tradition suivante : Quand Abd-el-Azîz eut appris les malheurs qui avaient frappé son père, son frère et les gens de sa maison, il renonça à l’obéissance et leva l’étendard de la révolte. Soleiman lui dépêcha un envoyé pour le ramener dans la droite voie, et comme cette démarche n’eut aucun succès, il écrivit secrètement à Habîb-Ibn-Abi-Obeida, petit-fils d’Ocba-Ibn-Nafê, ainsi qu’aux principaux Arabes, l’ordre de le faire périr. Abd-el-Azîz étant sorti quelque temps après, pour présider à la prière, récita la fateha [ou première sourate du Coran], et pendant qu’il lisait la hacca [le coup inévitable du même livre] Habîb lui dit : « Ce coup est arrivé pour toi, fils d’une prostituée ! » et au même instant, il lui abattit la tête avec son épée. Cette tête, ainsi que celle d’Abd-Allah furent apportées à Mouça leur père, et déposées devant lui[2]. Mouça fut alors mis à la torture jusqu’à ce qu’il mourut[3].

  1. En l’absence du khalife, son lieutenant présidait à la prière du vendredi. Ce devoir fut donc une attribution spéciale des gouverneurs des provinces, à moins que le cadi ne fût chargé de la remplir ; mais cela n’était qu’un cas exceptionnel.
  2. Ibn-Abd-el-Hakem dit : « On porta à Soleiman la tête d’Abd-el-Azîz, fils de Mouça, et on la déposé à ses pieds. Le khalife se tourna vers Mouça-Ibn-Noceir, qui s’y trouvait en ce moment, et lui dit : « Connais-tu celui-là ? » — « Oui, répondit Mouça, je l’ai connu pour un homme qui jeûnait et priait ; puisse-t-il encourir la malédiction de Dieu, si celui qui l’a tué vaut mieux que lui. » Abd-el-Azîz fut exécuté en l’an 97. »
  3. Ce renseignement est faux ; les meilleurs autorités, tels qu’Ibn-