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APPENDICE.

administration, qui dura deux ans et quelques mois, il reçut une lettre de Soleiman-Ibn-Abd-el-Mélek, qui lui intimait l’ordre de faire arrêter la famille et tous les dépendants de Mouça-Ibn-Noceir, et de les garder jusqu’à ce qu’ils eussent acquitté l’amende imposée à Mouça, amende dont le reliquat s’élevait à trois cent mille dinars[1]. « Pour leur arracher cette somme, lui écrivit-il, tu ne dois pas même épargner les tortures. » D’après cette injonction, Mohammed-Ibn-Yezîd fit arrêter et emprisonner Abd-Allah, gouverneur de Cairouan ; et un peu plus tard, il reçut par un courrier l’ordre de lui faire trancher la tête[2].

Quant à Abd-el-Azîz, l’autre fils que Mouça avait laissé en Espagne comme gouverneur, il soumit le pays, en fortifia la frontière et prit plusieurs villes dont son père ne s’était pas rendu maître. Ce fut un homme de bien et de talent. Il épousa la veuve[3] du roi Roderic, et la traita avec tant d’égards, qu’elle parvint à exercer une haute influence sur son esprit. Elle chercha même à l’amener jusqu’à exiger de ses compagnons qu’ils se prosternassent en se présentant devant lui, selon ce qui se pratiquait envers son premier mari. Bien qu’il lui fît observer qu’une telle cérémonie n’était pas dans les mœurs des Arabes, elle insista avec tant de persévérance qu’il fit pratiquer une porte basse dans la salle où il donnait audience, de sorte que ceux qui entraient furent obligés d’incliner la tête. Elle lui dit : « Tu es maintenant au nombre des rois ; il ne me reste plus qu’à faire pour toi

  1. Ibn-Abd-el-Hakem nous apprend qu’on emprisonna Mouça et qu’on lui imposa une amende de cent mille dinars ; mais, grâce à l’intercession de Yezîd-Ibn-el-Mohelleb, il obtint sa liberté et la remise de l’amende. En l’an 97, le khalife Soleiman-Ibn-Abd-el-Mélek fit le pèlerinage, emmenant Mouça avec lui, et celui-ci mourut à El-Merbed, sur la route de Médine, ou à Médine même, selon d’autres historiens.
  2. Abd-Allah, fils de Mouça-Ibn-Noceir, vivait encore en l’an 102, époque à laquelle Yezîd, fils d’Abou-Moslem, fut assassiné. Comme on soupçonna Abd-Allah d’avoir tramé le complot dont Yezîd fut la victime, Bichr-Ibn-Safouan, gouverneur de l’Égypte, en informa le khalife. Ce prince donna l’ordre de lui ôter la vie, et Bichr, après quelque hésitation, lui fit trancher la tête. Bichr se montra le persécuteur le plus acharné des amis et parents de Mouça-Ibn-Noceir.
  3. La sœur, selon Ibn-Abd-el-Hakem.