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le chien d’or

pour toujours ! Bénies soient les querelles qui sont suivies d’une pareille réconciliation ! bénis les outrages qui se lavent dans le vin ! Prenez vos sièges, messieurs.

Tous se remirent à la table. Bigot se sentait plus dispos que jamais.

— Valets, commanda-t-il, apportez maintenant les plus larges coupes, nous allons boire un fleuve d’eau de vie !… Nous allons boire une eau de vie capable de fondre les perles de Cléopâtre ! Nous allons boire à une dame plus belle que la reine d’Égypte ! Mais auparavant, nous allons conférer à Legardeur de Repentigny, toutes les franchises dont jouissent les associés de la Nouvelle-France.

Les valets se hâtaient, allant et venant sans cesse. La table fut bientôt couverte de coupes profondes, de flacons d’argent et de tout l’éclatant bagage de l’armée de Bacchus.

L’Intendant prit Legardeur par la main :

— Vous désirez être un des nôtres et entrer dans le sein joyeux de la Grande Compagnie ? lui demanda-t-il.

— Oui ! répondit Legardeur ivre et grave, je suis un étranger et vous pouvez me recevoir ; je sollicite mon admission. Par Saint-Pigot ! vous me trouverez fidèle !

Bigot l’embrassa sur les deux joues :

— Par les bottes de Saint-Benoît ! dit-il, vous parlez comme le roi d’Yvetot, Legardeur de Repentigny ! vous êtes digne de porter l’hermine à la cour du roi de Bourgogne.

— Regardez-moi le pied, Bigot, et dites à la compagnie si je puis, oui ou non, chausser la botte de St-Benoît !

— Par le joyeux Saint Chinon ! vous la chausserez, Le Gardeur !

Et il lui tendit un flacon de vin d’une pinte. Le Gardeur la vida d’un trait.

— Cette botte vous va admirablement ! exclama Bigot tout enthousiasmé.