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Page:Kirby - Le chien d'or, tome I, trad LeMay, 1884.djvu/104

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le chien d’or

Le chant, maintenant ! je conduis le chœur. Que tous ceux-là retiennent leur haleine qui ne veulent pas faire chorus.

Alors, l’Intendant se mit à chanter à haute voix ces vers burlesques de Molière qui réjouirent si souvent les orgies de Versailles :

Bene, bene, bene respondere !
Dignus, dignus es intrare
Mille, mille annis et manget et bibat,In nostro docto corpore !

Puis aux accords des violons, aux roulements des tambours de basque, tous se levèrent en choquant leurs coupes sonores.

Vivat ! vivat ! vivat ! cent fois vivat !
Novus socius qui tam bene parlat !
Mille, mille annis et manget et bibat,
Fripet et Friponat !

Chacun vint à son tour embrasser Le Gardeur et lui serrer la main ; chacun vint le féliciter de son admission dans la grande compagnie.

XI.

— Maintenant, reprit Bigot, nous allons boire une santé longue comme la corde de la cloche de Notre-Dame. Remplissons nos coupes de la quintessence du raisin, et vidons les en l’honneur de la Friponne !

La Friponne ! ce nom fut comme un choc électrique. Dans le pays, il était un opprobre ; mais à Beaumanoir il faisait rire. Pour montrer comme elle se moquait de l’opinion publique, la compagnie venait de lancer sur les grands lacs, pour faire le commerce de fourrures, un vaisseau qui s’appelait « La friponne ».

— Laissez rire ceux qui gagnent ! avait dit Bigot, à d’Estèbe, un jour que celui-ci était furieux parce qu’un habitant avait prononcé ce nom devant lui.

Nous acceptons le nom ! n’ayons pas peur des conséquences. Si ces rustres s’avisent de dire autre chose, je ferai écrire ce qu’ils diront en lettres d’une