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LE CHIEN D’OR

mises en jeu par les jolies élèves qui voulaient aller respirer l’air de la ville. Dans tous les cas, elles fermaient charitablement les yeux sur ce qu’elles ne pouvaient empêcher. Sous leur guimpe de neige battait toujours un cœur humain.

— Pourquoi donc n’êtes vous pas à Belmont, aujourd’hui, chevalier Des Meloises, demanda tout à coup, Louise Roy, une gentille questionneuse qui ne se gênait guère. Ses longs cheveux châtains excitaient l’admiration et l’envie de toutes les femmes. Il n’y en avait pas de plus beaux. Quand elle les détachait, ils la couvraient comme d’un voile splendide, et tombaient jusqu’à ses genoux. Ses yeux gris, profonds, étaient comme des puits de sagesse. Elle avait l’éclat du lis, et seules quelques taches de rousseur pâles, comme si elles eussent été faites par le soleil, ajoutaient à ses charmes en rompant la monotonie de sa blancheur. Les religieuses l’appelaient la princesse Mérovingienne, la fille des rois chevelus, et partout elle était reine par droit de jeunesse, d’esprit et de beauté.

— Je n aurais pas eu le plaisir de vous rencontrer à Belmont, Mademoiselle Roy, répondit le chevalier Des Meloises, j’ai préféré n’y pas aller.

La question ne lui avait pas plu.

— Vous êtes toujours flatteur, toujours poli, chevalier, reprit-elle.

Et un vif mouvement de ses lèvres mignonnes simula la moquerie. Je ne comprends pas, continua-t-elle, qu’on refuse d’y aller. Toute la ville y est, j’en suis certaine, car je ne rencontre personne dans les rues.

Elle s’empara coquettement d’un lorgnon et se mit à regarder partout :

— Personne ! je ne vois personne.

Ses compagnes prétendirent, plus tard, qu’elle regardait le chevalier en disant cela.

Elle rit aux éclats et avoua que c’était possible.