Aller au contenu

Page:Kirby - Le chien d'or, tome I, trad LeMay, 1884.djvu/294

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
282
LE CHIEN D’OR

XI.

Lisette profita de la permission et se mit à faire une description satirique d’un vieux et riche marchand, le sieur Kératry, un honnête Bas Breton, sans oublier personne de sa famille.

— Il paraît, continua-t-elle, que le sieur Kératry n’a appris l’usage du mouchoir de poche qu’après son arrivée ici, sur un vaisseau d’immigrants, et qu’il a toujours oublié de le mettre en pratique !

— Comment ! mais c’est vrai ! affirma Angélique qui reprit sa bonne humeur, au souvenir du vieux commerçant de la rue Sault au-Matelot. Elle continua en riant :

— Les Bas-Bretons ne se servent jamais que de leurs manches et de leurs doigts, et vous reconnaîtrez toujours un bon paysan du Finistère à cette marque infaillible de l’élégance Bretonne. Le sieur Kératry est fidèle à sa province, et ne peut pas se défaire de l’ancienne coutume. J’espère qu’il ne se démentira pas à Belmont !

Mais, bah ! laissons cela, Lisette ; je me soucie fort peu de ceux qui sont allés chez Philibert. Mais j’en connais un qui n’y sera pas longtemps. Marquez bien ce que je dis ! si le chevalier de Repentigny vient ce soir, faites-le monter tout de suite ; quand tous les autres resteraient à Belmont, il n’y restera pas, lui !

Elle fit du doigt un signe plus affirmatif encore que sa parole.

— Maintenant, Lisette, vous pouvez vous retirer ; je désire demeurer seule.

— Oui, madame ! c’est bien !

Lisette aurait voulu babiller encore, mais elle n’osa pas ; seulement, elle dit à la ménagère que la dame était aigrie et qu’avant le lendemain quelqu’un souffrirait certainement de sa mauvaise humeur.