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Page:Kirby - Le chien d'or, tome I, trad LeMay, 1884.djvu/304

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LE CHIEN D’OR

L’un des convives qui possédait une voix de stentor se mit à chanter dans son enthousiasme :

C’est dans la ville de Rouen
Ils ont fait un pâté si grand,
Ils ont fait un pâté si grand
Qu’ils ont trouvé un homme dedans !

Tout le monde fit chorus et battit des mains. Guillot Gabet mit la tête dans la porte de sa cuisine pour écouter ce chant solennel en l’honneur de son solennel pâté.

— Après tout, pensa-t-il, les dames et les messieurs du salon n’auraient pas fait un pareil accueil à mon œuvre. Puis, ce qui pis est, ils ne l’auraient pas tout dévoré !

Quel fut le cliquetis des couteaux et des fourchettes, dès que le bon curé de Ste  Foye eut récité le bénédicité, avec quelle dextérité les convives maniaient les armes, dans l’œuvre gigantesque de raser des pâtés hauts comme des tours et de niveler des montagnes de viandes et autres mets, serait chose impossible à dire !

Et combien de flocons de vin de Gascogne et de cidre de Normandie, toujours vidés, toujours remplis, se succédèrent serait chose impossible à calculer !

Guillot était rayonnant ! sa figure s’allumait comme ses fourneaux. Il se mit à chanter aussi, lui, le pâté de Rouen, mais il pensait au sien !

Le bourgeois, son fils et plusieurs des principaux invités vinrent un instant sous la feuillée, pour dire à ces braves gens quelques bonnes paroles, et leur donner une marque de respect. Ils furent reçus avec des applaudissements frénétiques et bien des coupes furent vidées en leur honneur.

XII.

Maître Guillot Gabet rentra dans sa cuisine et se mit à stimuler le zèle de ses marmitons. Il fallait remplacer le pâté perdu pour la table d’honneur. Il