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Page:Kirby - Le chien d'or, tome I, trad LeMay, 1884.djvu/328

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LE CHIEN D’OR

sur les marches de l’escalier. C’étaient Max Grimeau et Bartemy l’aveugle, les deux mendiants de la porte de la basse-ville. Elle comprit à peu près ce qu’ils disaient. Ils paraissaient compter la recette de la journée et arrêter le menu d’un souper dans un bouge de la basse-ville. Tout à coup survint un troisième personnage. Il passa vis-à-vis une lanterne, suspendue par une corde au-dessus de la rue, et Angélique put le distinguer aisément. Il était court, alerte, et portait un sac de cuir au côté. Les vieux mendiants l’accueillirent avec la plus vive satisfaction.

II.

— Aussi sûr que mon vieux mousquet ! c’est maître Pothier ! exclama Max Grimeau, en se levant pour serrer la main au nouveau venu.

Il continua sur un ton plaisant :

— C’est dommage que tu ne voies pas, Bartemy ! Les femmes du sud l’ont bien traité, va ! ses joues sont rondes ! et rouges comme des pivoines ! Il est gras comme un bourgmestre allemand !

Max avait vu le monde quand il marchait dans les rangs du maréchal de Belle-Isle, et il n’était jamais à bout de comparaisons.

Bartémy tendit la main au notaire.

— Je vous vois par la parole et le toucher, maître Pothier, fit-il ; je suis sûr que vous n’avez pas dit votre bénédicité devant des os nus, depuis que vous nous avez laissés !

— Oh ! j’ai tondu le mieux et le plus légalement que j’ai pu les sujets du roi, cependant je n’ai pas réussi comme vous, j’en suis convaincu.

— C’est que, voyez-vous, reprit l’aveugle en branlant la tête d’une façon pieuse et levant ses grands yeux blancs, nous demandons pour l’amour de Dieu ! Nous autres, mendiants, nous sauvons plus d’âmes que les curés, parce que nous exhortons les gens à la charité ! Nous devrions faire partie de la sainte hiérarchie, tout aussi bien que les Frères Gris…