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Page:Kirby - Le chien d'or, tome I, trad LeMay, 1884.djvu/338

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LE CHIEN D’OR

Angélique regarda les morceaux de papiers épars, sur le tapis. Il y avait un éclair de fureur dans ses paupières. Elle regretta d’avoir déchiré la lettre. Cependant, chaque mot de cette lettre était gravé dans sa mémoire comme avec un fer rouge.

— Je vois tout, maintenant ! s’écria-t-elle : la fausseté de Bigot et l’effronterie de cette fille qui va le chercher jusque chez lui !…

La voix d’Angélique ressemblait au cri de la panthère que la flèche a percée.

— Est-ce qu’Angélique Des Meloises va se laisser humilier par cette femme ? reprit-elle. Jamais !… Et mes rêves brillants ne se réaliseront jamais tant qu’elle vivra à Beaumanoir !… tant qu’elle vivra quelque part !

XIII.

De nouveau, elle se mit à regarder flamber le foyer, et la chambre secrète de Beaumanoir lui apparut de nouveau…

Elle se leva tout à coup… Son ange gardien, peut-être, voulait une dernière fois la conduire par la main.

— C’est encore Satan qui me souffle cette pensée à l’oreille murmura-t-elle. Sainte Marie ! je ne suis pas si méchante que cela ! L’autre nuit, cette pensée m’est venue. C’était pendant les ténèbres ; elle s’est dissipée quand la lumière du jour a paru ! Cette nuit elle revient encore, et elle me caresse comme une main chérie ! Et je ne tremble pas, je ne fuis pas !… Demain aussi elle reviendra et demeurera avec moi… Elle dormira à mes côtés ! L’enfant du péché aura vu le jour ! Il sera devenu démon et je subirai ses embrassements !…

Ô Bigot ! Bigot ! qu’avez-vous fait ? C’est votre faute ! c’est votre faute !

L’insensée essayait d’excuser son crime en accusant Bigot ! Elle était entraînée vers un gouffre inévitable. Elle se donnait à l’abîme avec une sorte de fureur.