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LE CHIEN D’OR

La mort ou l’éloignement de Caroline ! elle ne voyait pas autre chose… « Les plus beaux yeux du monde ! » pensait-elle. Il faut détruire l’influence de ces yeux, si Angélique Des Meloises veut monter sur le char de la fortune !…

Les autres femmes, se disait-elle encore avec amertume, abandonneraient les grandeurs pour l’amour, et trouveraient dans l’affection d’un mari fidèle comme Le Gardeur, une heureuse compensation aux tromperies de l’Intendant !…

XIV.

Mais Angélique ne ressemblait point aux autres femmes. Elle voulait vaincre les hommes et non pas se laisser vaincre par eux… Dans ses rêves insensés, elle entrevoyait les marches d’un trône, et elle ne voulait pas renoncer à la partie, parce qu’elle avait perdu le premier coup…

Bigot la trompait, mais il valait quand même la peine qu’elle se donnait pour le gagner. Elle n’avait pas d’amour pour lui, pas une étincelle ! C’étaient son nom, son rang, sa position, sa fortune, son influence à la cour… qu’elle adorait !… la cour ! avec la brillante existence qu’elle y mènerait !…

— Jamais rivale ne se vantera d’avoir vaincu Angélique Des Meloises ! s’écria-t-elle, en se tordant les bras.

C’en était fait, sa vanité cruelle chassait au loin l’amour de Le Gardeur, comme le vent chasse un duvet léger.

Elle se vendait pour de l’or !…

Et Le Gardeur qu’elle avait appelé de toute son âme allait accourir rayonnant d’espoir.