Page:Kirby - Le chien d'or, tome I, trad LeMay, 1884.djvu/353

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
341
LE CHIEN D’OR

enfin ! Je le suis, moi aussi, ce chemin ! et aussi vite et aussi joyeusement que personne en la Nouvelle-France !

— Filez, alors ! Allez devant ou derrière moi ! mais pas avec moi, de Péan ! Je coupe par le plus court pour arriver plus tôt, et je n’ai besoin de personne !

II.

En disant cela Le Gardeur partit.

De Péan ne le lâcha point. Il se douta de ce qui venait d’avoir lieu.

— Le plus court que je connaisse, répliqua-t-il, c’est par la taverne de Menut, où je me rends. J’aimerais bien votre compagnie, Le Gardeur ! il est fâcheux que vous n’aimiez pas la mienne. Nous avons une nuit de gala, chez Menut ! et de la musique ! … comme les grenouilles de Beauport en font à l’heure qu’il est ! Venez donc ! venez !

Il le prit par le bras de nouveau. Cette fois, Le Gardeur ne le repoussa point.

— Peu m’importe où aller ! dit-il.

Il oubliait le dédain qu’il ressentait pour cet homme et se laissait guider par lui. La taverne de Menut ! c’était justement l’endroit où il fallait aller pour noyer ses chagrins !

Ils se mirent tous deux à marcher en silence. Au bout de quelques minutes, de Péan dit :

— Qu’avez-vous donc, Le Gardeur ? Du malheur au jeu ? une fortune rebelle ? une fiancée volage, comme les autres femmes ?

Le Gardeur se fâcha.

— Prenez garde, de Péan ! menaça-t-il, en s’arrêtant, je vous brise les os si vous continuez ! Je crois bien que vous n’avez pas l’intention de me blesser, mais encore…

Il avait l’air féroce.

De Péan s’aperçut qu’il ne faisait pas bon de rouvrir la blessure.

— Pardonnez-moi, Le Gardeur, demanda-t-il avec une sympathie parfaitement feinte, je n’ai pas voulu