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LE CHIEN D’OR

J’ai une idée, Amélie. Je crois qu’il serait utile d’emmener Le Gardeur à Tilly pour quelque temps. Votre excellente tante m’a invité à aller visiter son manoir. Si j’accompagnais votre frère à cette chère vieille demeure ?

— Une promenade à Tilly avec vous, serait bien agréable à Le Gardeur, j’en suis sûre, et l’aiderait peut-être à rompre ces liens funestes qui le retiennent à la ville…

Tous les médecins du monde ne sauraient lui faire autant de bien que votre compagnie, ajouta-t-elle, dans un élan d’espérance. Il n’a nul besoin de remède ; c’est le bon soin qu’il lui faut, c’est…

— C’est la femme qu’il aime ! Amélie… continua vivement Philibert.

Et il ajouta presque tristement :

— Il arrive quelquefois que l’homme meurt quand il est trompé dans son amour et son espoir !…

Il l’avait regardée en disant cette parole.

Elle rougit et répondit vaguement :

— Ah ! Pierre, comme je vous ai de l’obligation !

Mais alors, comme il la quittait, elle leva sur lui un regard si plein de reconnaissance et d’amour qu’il ne l’oublia jamais.

Dans la suite des années, alors qu’il était devenu indifférent à la lumière du soleil, à l’amour de la femme et aux délices de la vie, il voyait toujours ce regard mouillé de larmes et brûlant de tendresse, descendre sur lui comme un rayon de flamme qui perce le nuage et montre le ciel bleu. Et il soupirait après ce beau ciel où l’attendait sa bien-aimée…