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Page:Kirby - Le chien d'or, tome I, trad LeMay, 1884.djvu/71

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le chien d’or

tures, les vastes prairies et les champs de blé mûrissants. Des fossés étroits ou des bancs de gazon, parsemés de touffes de violettes, de fougères et de fleurs sauvages de toutes les teintes, séparaient les champs.

Il ne semblait pas nécessaire alors de séparer autrement les fermes, tant l’accord régnait entre ces honnêtes colons qui avaient apporté de la vieille Normandie leur mode de culture et leurs âpres vertus.

Çà et là, sur la nappe verte des prés ou dans les vergers ombreux, se dessinaient les pignons rouges et les murs blancs des maisons. Toutes les fenêtres étaient ouvertes pour laisser entrer l’air chargé de parfums.

V.

Tout-à-coup, avec les senteurs suaves entra le bruit des sabots d’un cheval retentissant sur le chemin dur, et de jolies figures s’avancèrent pour examiner curieusement l’officier portant le casque à plume blanche, qui dévorait ainsi la route.

C’était un homme digne d’attirer les regards, grand, droit et fièrement découplé. Chez lui, le type normand, sans être parfait, était digne et beau. Des yeux bleus et profonds, fermes sous d’épais sourcils, regardaient avec persistance, mais douceur, tandis que le menton bien arrondi, et les lèvres un peu serrées donnaient à toute sa physionomie un air de fermeté qui s’accordait bien avec son loyal caractère. C’était le colonel Philibert en uniforme royal. Ses cheveux châtains étaient retenus par un ruban noir, car il n’aimait pas à porter la perruque poudrée tant à la mode à cette époque.

Depuis longtemps il n’était passé sur le chemin de Charlesbourg ; depuis longtemps il n’avait admiré, comme aujourd’hui, le site enchanteur qu’il traversait. Cependant, il le savait bien, il y avait un spectacle plus beau : le grand promontoire de Québec avec sa couronne d’invincibles fortifications, et son bouquet de glorieux souvenirs, les plus