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Page:Laisnel de La Salle - Croyances et légendes du centre de la France, Tome 1.djvu/84

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du vieux temps

Anaïd, et « M. Cirbied, membre de la Société des antiquaires de France et Arménien lui-même, pense que d’Anaïd les Romains ont fait leur Diana en lisant Anaïd à rebours[1]. » — Notons encore qu’une autre Anna, la sœur de Didon, fut aussi l’objet d’un culte, en Syrie, et que ce culte ayant été adopté, comme tant d’autres, par les Romains, finit par se confondre avec celui d’Anna Perenna. — Enfin, à Hiérapolis, lors de la fête des Bûchers (πνρά), on brûlait un simulacre de la déesse Anna[2].

Le mythe de la Vieille de la mi-carême ayant naturellement succédé à celui d’Anna Perenna, il n’est pas extraordinaire que le souvenir de cette antique tradition se soit particulièrement conservé à Bourges, à Argenton et à Châteaumeillant, cités d’origine gauloise, longtemps habitées par des Romains, et qui figurent sur leurs itinéraires[3].

Nous ne devons pas passer sous silence une autre solennité que l’on célébrait encore tous les ans à Rome, et qui a plus d’un point de ressemblance avec la légende de la Vieille de la mi-carême.

Lors de cette fête, que l’on appelait la fête des Argées, et dont il est question dans Ovide[4], Varron, Macrobe[5] et Denis d’Halicarnasse[6], les pontifes et les vestales jetaient du haut du pont Sacré dans le Tibre des mannequins de jonc ou de paille représentant des vieillards. — C’est ainsi que nous avons vu le peuple de Bourges et les enfants de Cluis jeter dans la

  1. Désiré Monnier, Traditions populaires comparées, p. 226 et 227.
  2. Alfred Maury.
  3. Avaricum, Argentomago et Mediolano se trouvent sur la carte théodosienne, et des voies romaines dont on reconnaît encore très-bien les traces, existaient entre ces trois villes. (Voy. l’Histoire du Berry de M. Raynal, t. I, p. 97 et suiv.)
  4. Fastes, liv. V, v. 622 et suiv. — Cette fête des Argées (Argei, Grecs) devait être d’origine hellénique.
  5. Livre I, ch. 2.
  6. Livre I, no 33.