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Page:Laisnel de La Salle - Croyances et légendes du centre de la France, Tome 1.djvu/85

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souvenirs

rivière les débris de la Vieille. — « Quel sens donner à cette étrange cérémonie ? se demande l’un des commentateurs d’Ovide, M. Théodose Burette. — Si l’on en croit quelques auteurs, ajoute-t-il, ce n’était autre chose qu’un symbole de l’ancienne année, jetée dans le fleuve, sous la forme d’un vieillard décrépit, au commencement de la nouvelle année ouverte par Mercure, génie de l’astronomie. »

Cette cérémonie des Argées était en outre une imitation fort adoucie des sacrifices expiatoires dans lesquels on immolait des vieillards, et que les Latins des premiers âges offraient au dieu du temps, à Saturne. — « Nos pères, dit Festus, appelaient depontani senes, les sexagénaires que l’on précipitait autrefois du haut d’un pont. » — Aujourd’hui, en France, on est beaucoup plus tolérant pour les sexagénaires : quand certains vieux fonctionnaires ont dépassé la soixantaine, on ne les jette pas à l’eau, on les admet courtoisement « à faire valoir leurs droits à la retraite. »

On peut encore ranger parmi les fêtes chroniques la coutume qu’avaient les Égyptiens de se rendre, chaque année, aux bords du Nil et d’y noyer solennellement une jeune fille[1].

Il ne serait peut-être pas impossible de trouver des traces de notre Vieille dans les usages et les croyances gauloises.

Nous avons dit, en ouvrant ce chapitre, que la foire (feria ?) connue à Châteaumeillant et dans les environs sous le nom de foire aux Vieilles, tombait invariablement le premier mardi du carême ; or, c’était à cette époque précise, c’est-à-dire « le sixième jour de la dernière lune d’hiver, en février ou mars », que s’ouvrait l’année gauloise et que les druides procédaient à la récolte du gui[2]. — Cette coïncidence est d’autant plus à remarquer que l’antique Mediolanum (Châteaumeillant) a dû

  1. Mythologie de Banier, t. IV, p. 277 ; — Boulanger, l’Antiquité dévoilée.
  2. « L’astronomie gauloise compte par nuits et non par jours, par lunaisons et non par mois solaires… Le sixième jour de la lune est un jour solennel pour les Gaulois : il commence toujours le mois, l’année