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souvenirs

et Pline dit que, pour la même raison, l’on composait de branches d’aubépine les torches que l’on portait dans les cérémonies nuptiales : Spina nuptiarum facibus auspicatissima[1]… — C’est ainsi qu’au moyen âge, lorsque les fiancés se rendaient à l’église, l’une des filles d’honneur portait toujours un rameau de cet arbuste en chantant le lai de l’épine blanche. De là encore le grand rôle que l’aubépine a joué autrefois chez les Francs[2] et qu’elle joue encore aujourd’hui en plusieurs de nos provinces, surtout en Vendée, lors de la célébration des mariages.

Toutes ces vieilles croyances auraient-elles quelque rapport avec la parabole des arbres et de l’épine, racontée par la Bible en ces termes : — « Alors, tous les arbres dirent à l’épine : « Viens, toi, et règne sur nous. » Et l’épine répondit aux arbres : « Si véritablement vous me choisissez pour roi, venez, et vous retirez sous mon ombre…, etc.[3] »

Mais le buis est, en Berry, l’arbuste saint par excellence. On est toujours sûr d’en rencontrer un pied séculaire dans l’un des coins de la chènevière qui avoisine chacune de nos vieilles habitations rurales. De même que l’on voyait, à l’entrée de toute maison gauloise, plusieurs branches de gui immergées dans un vase d’eau lustrale, de même on trouve toujours quelques ramilles de buis attachées aux portes de nos chaumières, ou suspendues près du bénitier qui protége l’intérieur de nos ménages. Enfin, nos empiriques de village, lorsqu’ils pansent du secret[4], se servent fréquemment du buis dans leurs bizarres incantations, et nos ménagères, lorsque leurs opérations domestiques sont contrariées par l’effet d’un sort, ont bientôt rompu le charme au moyen de quelques feuilles détachées du rameau sanctifié.

  1. Histoire naturelle, liv. XVI.
  2. Mémoires de l’Académie celtique, t. IV.
  3. ix, Juges.
  4. Voy. plus loin, livre III, ch. v. l’article : Panseux de secret.