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Page:Langlois - La decouverte de l'Amerique par les Normands vers l'an 1000. Deux sagas islandaises, 1924.djvu/116

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la découverte de l’amérique

série d’aventures merveilleuses : ils approchèrent de la gueule de l’enfer, ils trouvèrent le corps d’une géante de cent pieds, une île où ils furent attaqués par des souris grosses comme des chats. Ils abordèrent ainsi à l’île des Pygmées, puis dans une autre où vivait un très antique ermite et où ils furent poursuivis par un chat monstrueux.

D’après une autre version, ils rencontrèrent le monstre marin Jasconius qu’ils prirent pour une île, puis l’île merveilleuse des oiseaux, la rivière du sommeil, la mer congelée, un griffon qui rappelle singulièrement les « rocs » des contes orientaux, l’île des forgerons qui rappelle Polyphème et l’île de Judas Iscariote qui expie ses crimes au sommet d’un rocher isolé et battu par les tempêtes.

On voit là toute une trame de légendes anciennes, combinaisons de contes orientaux comme les aventures de Sinbad, des légendes classiques transmises par les moines traducteurs des vieux textes, des récits de marins irlandais et autres.

Peut-on admettre qu’il y ait là un fonds de vérité dans ce fatras de fables ? Certains l’ont pensé et ont cherché des traces de réalités géographiques pour y retrouver Terre-Neuve, l’Islande, voire Jan Mayen.

On sait, historiquement, que les Faröe et les îles voisines furent habitées vers les viie et viiie siècles par des religieux venus d’Écosse et d’Irlande, comme Brandan. L’histoire ne dit pas, à vrai dire, comment ils y vinrent, considérant sans doute ce détail comme superflu. Mais nous savons par ailleurs que les navires de commerce danois, écossais ou irlandais faisaient un trafic quelque peu irrégulier avec les îles même lointaines ; et qu’ils prenaient généralement des passagers. Nous pouvons donc admettre comme parfaitement normale l’exode de ces ermites.

Il est beaucoup plus difficile d’accepter les aventures de moines embarqués sur de mauvais bateaux, tout au moins pour de longues traversées. Qu’ils aient pu, à la grâce de Dieu, gagner des îles pas très éloignées de la côte, passe encore ; mais que, sans connaissances maritimes spéciales, ils aient pu atteindre à