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XIV
INTRODUCTION

Mais si nous pouvons admettre que les scribes n’ont pas toujours saisi l’exacte valeur de certains mots, relevant de la terminologie maritime ou guerrière habituelle aux héros d’antan, il faut bien reconnaître qu’ils ont laissé aux textes une fraîcheur presque originelle et une couleur locale étonnante. Grâce à leur travail, nous connaissons des faits historiques intéressants. Et, ils nous les ont transmis épars dans une littérature presqu’aussi fraiche que ces peintures d’Égypte que nous livrent les hypogées inviolés pendant des siècles.

Les Sagas traitent de sujets assez divers dans un cycle cependant restreint : les mythes religieux, les aventures guerrières des héros, les voyages lointains, les disputes de clans, les guerres, les pillages, les meurtres. Les unes ont un caractère purement religieux ou mystique, les autres se rapprochent de l’histoire ; toutes sont pleines de cette vie âpre et fruste de ces contrées et de ces temps lointains.

Elles sont écrites dans un style bref, sec, presque heurté. On y trouve par place des traces du pathos teutonique dû aux origines ethniques. Peu de descriptions, peu de repères historiques et ceci est souvent regrettable. Toujours une franchise, une simplicité qui sentent la chose vraie.

Les deux Sagas islandaises que nous étudierons plus spécialement sont des Sagas d’histoire. Elles sont moins ampoulées, si possible, plus réalistes que la moyenne, mais une vie intense s’en dégage.

Les auteurs modernes sont, à de rares exceptions près, unanimes à reconnaître leur caractère fondamental de véracité. Il n’est guère possible de les citer tous, mais combien édifiantes sont les opinions suivantes :

Rafn (qui fit sortir les Sagas du Vinland de l’oubli vers 1837) écrivit [28] : « La langue est pure, la structure des phrases simple et naturelle. Les poésies encastrées dans le texte portent tous les caractères d’ancienneté… On a le spectacle d’écrivains persuadés de la vérité des choses, confiant dans leur foi, exposant leur récit aux lecteurs. »

Toute une école le suivit. Son opinion est corroborée par celle