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par les normands vers l’an mille

te dire que je souhaite échanger mon navire avec vous les frères, car le vôtre est plus grand et je désire partir d’ici. » « J’accepte ceci, dit-il, si c’est ton bon plaisir. » Là-dessus, ils se séparèrent, elle retourna à sa hutte et Finbogi a son lit. Elle grimpa dans le sien et réveilla Thorvald avec ses pieds froids. Il lui demanda pourquoi elle était si refroidie et mouillée.

Elle répondit avec une grande passion : « J’ai été voir les frères pour essayer d’acheter leur navire, car je voudrais avoir un plus grand bateau, mais ils ont fort mal reçu mes propositions, ils m’ont frappée et violentée rudement. Pauvre misérable, ne vengeras-tu pas ma honte et la tienne, pour que je sente mieux que je ne suis plus au Groenland ; pour moi, je me séparerai de toi si tu ne tires pas vengeance de ceci. » Il ne put supporter ses reproches plus longtemps, il ordonna à ses hommes de se lever de suite, de prendre leurs armes et ils le firent. Ils allèrent directement à la hutte des frères, y pénétrèrent, tandis que tout le monde y dormait, ils se saisirent d’eux, les lièrent et les conduisirent ainsi ligottés dehors l’un après l’autre. Au fur et à mesure qu’ils sortaient, Freydis les faisaient tuer. Tous les hommes furent massacrés ainsi, il ne restait que les femmes à qui personne ne voulait toucher. Alors, Freydis s’écria : « Donnez-moi une hache. » Ce fut fait et elle abattit les cinq femmes et les laissa mortes.

Ils retournèrent à la hutte après cet épouvantable forfait et il fut évident que Freydis était très satisfaite de son œuvre. Elle dit en s’adressant à ses compagnons : « Si vous retournez au Groenland, je m’arrangerai pour faire mourir tout homme qui voudrait parler de ces événements. Vous aurez à dire que nous les avons laissés ici vivants quand nous sommes partis. » Au début du printemps, ils réarmèrent le navire qui avait appartenu aux frères et le chargèrent avec tous les produits du pays qu’ils purent trouver et que le navire pouvait contenir. Ils prirent la mer, firent un bon voyage et arrivèrent avec leur navire au Eiriksjord, au début de l’été. Karlsefni était encore là avec son navire, attendant un vent favorable. On dit que jamais navire chargé plus richement que le sien n’avait quitté le Groenland.