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Page:Launay, Dallet - La Corée et les missionnaires, 1901.pdf/167

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route avec la grande caravane pour la Chine. Au bout de trois mois de marches très pénibles, sur les mauvais chemins de la Corée et à travers les plaines glacées de la Mandchourie, les voyageurs faisaient leur entrée solennelle dans la capitale de l’Empire du Milieu. Leur costume national et leur tête dépourvue de la longue tresse chinoise étaient, naturellement, des sujets d’étonnement pour les citoyens civilisés de la grande ville.

Seng-houn-i était de nouveau au milieu de ses amis en Corée, au printemps de 1784, et, avec l’enthousiasme d’un jeune voyageur, leur faisait une description détaillée des merveilles qu’il lui avait été donné d’admirer dans ce long voyage. Piek-i, accouru l’un des premiers, fut au comble de la joie en recevant de son ami les livres tant désirés de la religion chrétienne. Afin de les étudier plus à loisir, il se retira quelque temps dans la solitude. Là, le travail de la grâce s’achève dans son esprit et dans son cœur. Éclairé par la simple exposition des dogmes du christianisme, il n’eut bientôt plus qu’un désir : se faire baptiser et partager sa joie avec tous ses concitoyens en leur annonçant la bonne nouvelle.

L’exemple de son ami Seng-houn-i l’entraînait aussi. Profitant de son séjour à Pékin, le jeune lettré y avait visité l’évêque des missionnaires. Après de sérieuses réflexions, la grâce touchant son cœur, avec le consentement de son père il reçut le baptême. Saluant en lui les fondements d’une nouvelle Église, le prêtre lui avait donné le nom du premier des apôtres, la pierre fondamentale de l’Église de Jésus-Christ.

Transporté par la lecture de ces livres si simples et cependant si profonds, qui étaient le contrepoids des doctrines contradictoires et embrouillées des livres sacrés de son pays, Piek-i se mit à prêcher quelques-uns de ses amis. Ses raisonnements, puisés dans ces ouvrages sérieux, étaient clairs et inattaquables. Son éloquence naturelle embellissait ses discours, et son zèle pour la vérité lui gagnait peu à peu des disciples. Sûr du succès, s’il parvenait à convertir quelques puissants lettrés regardés comme des oracles par leurs concitoyens, il se tourna vers eux dans l’espoir de trouver en leurs personnes un appui décisif à la