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Page:Launay, Dallet - La Corée et les missionnaires, 1901.pdf/178

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tout l’éclat possible. À la mort d’un parent, on s’empresse de fabriquer une planchette dans laquelle est censée venir résider lame du défunt. Cette tablette sacrée doit être faite d’un bois tout spécial. « Avant d’avoir été coupé, il ne doit avoir entendu ni le chant du coq, ni l’aboiement du chien. » Faite de ce bois extraordinaire, la tablette peinte en blanc reçoit les noms, titres et qualités du défunt. De petits trous pratiqués sur les côtés permettent à son âme d’y entrer et d’y séjourner. Une salle de la maison est destinée à ces tablettes des ancêtres, devant lesquelles, tous les jours, on vient se prosterner et offrir un peu de riz, du tabac ou de l’encens. À la quatrième génération seulement on enterre toutes ces tablettes, et leur culte cesse définitivement.

Dans l’été de 1791, un courageux néophyte, Paul Ioun Tsi-t’siong-i, perdit sa mère. En bon fils, il la pleura sincèrement ; mais, en courageux chrétien, il se refusa à toutes les superstitions païennes qui accompagnent les funérailles. L’évêque de Pékin avait clairement réglé cette grave question dans sa lettre à Xavier Kouen. Les tablettes des ancêtres et d’autres pratiques superstitieuses y étaient sévèrement prohibées par le prélat. C’était imposer un sacrifice bien pénible aux Coréens ; c’était les toucher, pour ainsi dire, à la prunelle de l’œil que de condamner des usages si universels et consacrés par la pratique des siècles passés. Aussi plusieurs chrétiens, jusque-là peu instruits, furent atterrés par cette défense de l’évêque. Mais Paul était trop fervent pour hésiter un instant dans cette circonstance, et, en dehors de funérailles dignes du rang de la défunte, il s’abstint de toute pratique superstitieuse sans se soucier de l’opinion.

La conduite du courageux jeune homme fut un scandale pour tout le pays. En voyant son mépris des coutumes reçues, les païens poussèrent de telles clameurs contre ce fils dénaturé, que le mandarin se vit obligé d’examiner cette grave affaire, C’était une occasion favorable pour le ministre des crimes d’assouvir enfin sa haine si longtemps comprimée contre les chrétiens. Dès qu’il eut entendu parler du crime de Paul, il le fit arrêter avec son cousin Jacques Kouen. Une visite domiciliaire mit au jour un autre attentat non moins abominable des deux cousins. La boîte