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l’affaire sougraine

XVI

La Longue chevelure reprit :

— Je retardai mon départ pour sauver mes semblables. Je réussis à les faire sortir de l’endroit dangereux où ils s’étaient arrêtés. Ce fut presque un miracle. Ma femme leur servit de guide à travers les montagnes. Elle portait une enfant dans une nagane. J’avais mis dans les langes de la petite, comme plus en sûreté sous la protection de l’innocence, une somme considérable, toute ma fortune alors. Je dus rester dans mon wigwam pour empêcher les soupçons de peser sur ma tête. Ce fut en vain, l’on m’accusa de trahison. Je vis que je n’échapperais point à la vengeance, et je profitai des ténèbres pour fuir. J’espérais rejoindre la caravane des Visages Pâles. Un matin, à la sortie des montagnes, je m’agenouillai sur le gazon au bord d’une source limpide qui descendait joyeusement de roche en roche comme un oiseau qui saute de branche en branche, et je priai pour les fugitifs, pour ma pauvre femme, pour ma petite