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l’affaire sougraine

ombres, sans bruit, sans amour, sans charité, pour se communiquer les rumeurs saisies au vol. Ils prenaient un suprême intérêt à la lutte qui se livrait loin d’eux. Ce qu’ils pouvaient faire, ils l’avaient essayé. Ils n’avaient plus qu’à suivre d’un œil inquiet les péripéties du combat. Les vœux qu’ils formaient n’étaient point pour le triomphe des anges et du jeune médecin, mais pour le triomphe de la mort. Elle tardait bien cette mort pourtant si vorace d’habitude… elle tardait bien à venir.

Un jour, la rumeur apporta une nouvelle terrible pour les trois conjurés… La Longue chevelure avait le délire… Il allait mourir peut-être… Mais ce n’est pas cela qui les effrayait. Dans sa folie il avait parlé ; dans son délire il avait jeté un nom en pâture à la curiosité du monde, et plusieurs l’avaient entendu ce nom qui réveillait un triste souvenir. Il avait parlé de Sougraine.

— Ne tire pas, Sougraine, avait-il dit, si je le manque, tu l’attaqueras à ton tour.

Il faisait évidemment allusion à la chasse. Il avait dit encore :

— La Langue muette, cache-toi bien, car si l’on