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Page:LeNormand - La plus belle chose du monde, 1937.djvu/52

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LA PLUS BELLE

Jean Sylvestre ! Bien des années auparavant, Lucette avait eu avec Marie Sylvestre, une querelle qui s’était terminée par des coups. Le lendemain, elle s’était trouvée face à face avec Jean, — de six ans au moins plus âgé qu’elle, — il lui avait barré la route et lui avait déclaré sur un ton menaçant :

— Si tu as le malheur de toucher encore à Marie, petite méchante, tu verras…

Elle était méchante, évidemment, car sans réfléchir, d’un mouvement irrésistible, elle l’avait giflé et s’était enfuie à toutes jambes.

Jamais elle ne l’avait revu de près. Tant qu’ils étaient demeurés voisins, elle avait fui en l’apercevant. Lui pensa sûrement qu’elle avait peur ; en vérité, elle avait honte. Impulsive, elle demanda :

— Raoul serait-il fâché, si j’écrivais sur sa carte ?

— Il ne le saura même pas.

Alors, Lucette griffonna cinq lignes de badinage, rappela l’odieux souvenir, demanda pardon, signa de tout son nom. Ensuite, elle cessa d’y penser et pour une excellente raison. Quelques jours après, un événement imprévu s’annonça qui romprait enfin l’uniformité du temps. Sa marraine l’amenait passer avec elle trois mois à Percé.