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Page:LeNormand - La plus belle chose du monde, 1937.djvu/67

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Elle raisonnait ainsi lorsqu’une de ses sœurs, à la naissance de son premier enfant, fut très malade. Monique entendit crier tyranniquement le petit, dont l’arrivée, pour quelque temps, bouleversa les habitudes de la maison. Elle vit le mari de mauvaise humeur, injuste au moindre prétexte. En passant, elle ne pouvait saisir que cette apparence des choses : les ennuis, les soucis nouveaux. Elle ne comprenait rien à la tendresse qui grandissait au cœur de la mère pour le petit être qu’elle serrait dans ses bras. Surveillant sournoisement son beau-frère, dont elle avait une année auparavant surveillé d’aussi près les beaux gestes de fiancé, — Monique maintenant le jugeait d’après ce qu’elle avait appris des hommes dans Une vie de Maupassant, ou chez d’autres auteurs aussi démoralisants. Et déjà elle redoutait les rudesses du sort.

Pendant quelque temps, elle cessa de considérer l’amour comme un bonheur, et se plut à redire que l’argent, le luxe, les voyages et l’égoïsme procuraient plus sûrement la félicité.

Mais elle n’était pas véritablement égoïste ; sa révolte découlait de sa pitié devant les inquiétudes de sa mère, si l’on apportait une note plus élevée, si une maladie obligeait à des dépenses additionnelles ; calculs et privations, sans jamais une heure de détente, maigres économies tou-