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Page:Les Soirées de Médan.djvu/51

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LES SOIRÉES DE MÉDAN

fossé. Juste Dieu ! elle l’avait trouvé ! Le ciel voulait donc sa mort ? Elle retint un cri, elle se laissa glisser dans le fossé.

— Tu me cherchais ? demanda-t-il.

— Oui, répondit-elle, la tête bourdonnante, ne sachant ce qu’elle disait.

— Ah ! que se passe-t-il ?

Elle baissa les yeux, elle balbutia :

— Mais, rien, j’étais inquiète, je désirais te voir.

Alors, tranquillisé, il lui expliqua qu’il n’avait pas voulu s’éloigner. Il craignait pour eux. Ces gredins de Prussiens étaient très capables de se venger sur les femmes et sur les vieillards. Enfin, tout allait bien, et il ajouta en riant :

— La noce sera pour dans huit jours, voilà tout.

Puis, comme elle restait bouleversée, il redevint grave.

— Mais, qu’as-tu ? Tu me caches quelque chose.

— Non, je te jure. J’ai couru pour venir.

Il l’embrassa, en disant que c’était imprudent pour elle et pour lui de causer davantage ; et il voulut remonter le fossé, afin de rentrer dans la forêt. Elle le retint. Elle tremblait.

— Écoute, tu ferais peut-être bien tout de même de rester là… Personne ne te cherche, tu ne crains rien.

— Françoise, tu me caches quelque chose, répéta-t-il.

De nouveau, elle jura qu’elle ne lui cachait rien. Seulement, elle aimait mieux le savoir près d’elle. Et elle bégaya encore d’autres raisons. Elle lui parut si singulière, que maintenant lui-même aurait refusé de s’éloigner. D’ailleurs, il croyait au retour