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ÉVANGÉLINE

Il allait plein d’ardeur, humble et divin apôtre,
Sans se décourager, d’une troupe vers l’autre,
Pour calmer et bénir son peuple infortuné.
En arrière des feux, sous un arbre incliné,
Il vit Évangéline assise avec son père.
Le front majestueux de ce vieillard austère
Aux lueurs du brasier reluisait de pâleur ;
Son œil hagard et fixe exprimait la douleur ;
Ses mains se bleuissaient ; la vie ou la pensée
Sur son front chauve et blanc paraissait effacée,
Et sa lèvre livide était sans mouvement.
Sa fille, toute en pleurs, prodiguait vainement
Les plus aimables soins, la plus douce tendresse,
Il était insensible aux pleurs de sa détresse
Comme à son dévoûment, comme à ses mots d’espoir.
Sur les feux qu’attisait le léger vent du soir,
Ouverts sinistrement, mornes, vitreux et ternes,
Ses yeux étaient fixés pareils à deux lanternes