Page:Lumbroso - Souvenirs sur Maupassant, 1905.djvu/207

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nature, mais il souhaitait qu’elle fût un peu sauvage. Il fuyait les endroits trop civilisés. Tandis que quelques-uns de ses compagnons fréquentaient chez la mère Fournaise, auprès de Croissy, il allait camper avec Petit-Bleu dans un cabaret isolé à Sartrouville, considérant que ce lieu, moins « élégant » que l’île de la Grenouillère lui donnait davantage l’illusion d’une existence champêtre. C’est là sur une méchante table de cuisine qu’il écrivit ses derniers vers et ses premières pages de prose. M. Léon Fontaine a gardé pieusement les essais, les brouillons que Petit-Bleu ramassa jadis dans la chambrette de Sartrouville et d’autres manuscrits que Maupassant avait soumis à son jugement, deux pièces de théâtre inédites, la Demande, comédie en un acte, la Comtesse de Béthune, drame en trois actes, qui ne sont que d’informes élucubrations d’écolier, et un recueil que le jeune poète méditait de publier, un cahier tout entier, recopié de sa main et renfermant une sélection des poésies qu’il composa pendant son enfance et son adolescence de 1863 à 1873. Ces morceaux ont été choisis parmi ceux qu’il pensait être les meilleurs. En les réunissant aux pièces que Mme de Maupassant a eu la gracieuseté de me remettre, j’ai sous les yeux un tableau assez exact du labeur accompli par l’écrivain durant la période des tâtonnements et des débuts. Essayons de tirer de ces documents quelques éclaircissements sur ses états d’âme successifs et la formation de son génie.


Le cahier porte sur sa couverture « Vers » sans autre indication : il est formé de feuilles grand in-