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Page:Marcel Proust - Chroniques, éd. 1936.djvu/13

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SILHOUETTE D’ARTISTE[1]


Cest un genre. Et, bien que la nécessité d’aller souvent au théâtre et l’illusion de s’y sentir regardé aient donné au monsieur qui le cultive des habitudes d’élégance, pour être drôlatique il signe ses articles : « Le monsieur du contrôle » ou « un Pompier de service », faisant celui qui allume les quinquets ou celui qui vend les programmes. Souvent, c’est un jeune homme. Alors, de préférence, il fait des silhouettes d’actrices. Il flatte celles qui sont jolies, essaye de lancer celles qui n’ont pas de talent pour s’en bien faire venir, vendant son indépendance pour acheter leurs faveurs. Avec les débutantes, il sait

  1. Ai-je besoin de dire que cette silhouette ne prétend ressembler à personne, et que tous les traits en sont inventés selon la fantaisie toute pure ? Si par hasard il se trouvait dans la presse un « Monsieur du Contrôle » ou un « Pompier de service », qu’il m’excuse d’avoir à mon insu pris son nom, comme je lui pardonne de m’avoir soufflé mon « mot » ; il n’a rien à envier au « marchand de lorgnettes ». C’est ainsi que je devais d’abord signer cet article. Et j’ai des raisons bien meilleures que l’intention de m’y adonner quelquefois moi-même, pour ne pas médire sérieusement d’un genre récemment illustré par M. Henry Gauthier-Villars.