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PÈLERINAGES RUSKINIENS EN FRANCE

Des milliers de fidèles vont aller à Coniston prier devant une tombe où ne reposera que le corps de Ruskin : je propose à ses amis de France de célébrer autrement le « culte de ce héros », je veux dire en esprit et en vérité, par des pèlerinages aux lieux qui gardent son âme (tel ce tombeau d’Italie qui s’intitule le tombeau de Shelley et qui du poète, dont le reste du corps fut consumé par la flamme, ne contient que le cœur) et qui lui confièrent la leur, pour qu’en la faisant passer dans ses livres, il la rendît immortelle. Il n’est pas besoin pour accomplir ces pèlerinages d’aller jusqu’aux « Pierres » de Florence ou de Venise : Ruskin a beaucoup aimé la France.

« Pendant toute ma vie, ma pensée a gravité autour de trois centres, Rouen, Genève et Pise. Tout ce que j’ai fait à Venise n’a été que du travail accessoire, entrepris parce que son histoire était encore à écrire, que, dans le monde de la peinture, on n’avait jamais