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Page:Maupassant - Conte de la bécasse, 1906.djvu/260

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un fils

C’est alors seulement que le souvenir très vif de la petite bonne me revint. Je demandai : — Vous rappelez-vous une gentille petite servante qu’avait alors votre père, et qui possédait, si ma mémoire ne me trompe, de jolis yeux et des dents fraîches ? »

Il reprit : « Oui, Monsieur ; elle est morte en couches quelque temps après. »

Et, tendant la main vers la cour où un homme maigre et boiteux remuait du fumier, il ajouta : « Voilà son fils. »

Je me mis à rire. « Il n’est pas beau et ne ressemble guère à sa mère. Il tient du père sans doute. »

L’aubergiste reprit : « Ça se peut bien ; mais on n’a jamais su à qui c’était. Elle est morte sans le dire et personne ici ne lui connaissait de galant. Ç’a été un fameux étonnement quand on a appris qu’elle était enceinte. Personne ne voulait le croire. »

J’eus une sorte de frisson désagréable, un de ces effleurements pénibles qui nous touchent le cœur, comme l’approche d’un lourd chagrin. Et je regardai l’homme dans la cour. Il venait maintenant