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Page:Maupassant - Fort comme la mort, Ollendorff, 1903.djvu/221

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fort comme la mort

— Attends une minute, mon enfant, j’ai un mot à dire à M. Bertin.

Puis elle passa vite dans le petit salon voisin où il faisait souvent attendre ses visiteurs. Il la suivit, la tête brouillée, ne comprenant pas. Dès qu’ils furent seuls, elle lui saisit les deux mains et balbutia :

— Olivier, Olivier, je vous en prie, ne la faites plus poser !

Il murmura, troublé :

— Mais pourquoi ?

Elle répondit d’une voix précipitée :

— Pourquoi ? pourquoi ? Il le demande ? Vous ne le sentez donc pas, vous, pourquoi ? Oh ! j’aurais dû le deviner plus tôt, moi, mais je viens seulement de le découvrir tout à l’heure… Je ne peux rien vous dire maintenant… rien… Allez chercher ma fille. Racontez-lui que je me trouve souffrante, faites avancer un fiacre, et venez prendre de mes nouvelles dans une heure. Je vous recevrai seul !

— Mais enfin, qu’avez-vous ?

Elle semblait prête à se rouler dans une crise de nerfs.

— Laissez-moi. Je ne veux pas parler ici. Allez chercher ma fille et faites venir un fiacre.

Il dut obéir et rentra dans l’atelier. Annette, sans soupçons, s’était remise à lire, ayant le cœur inondé de tristesse par l’histoire poétique et lamentable. Olivier lui dit :

— Ta mère est indisposée. Elle a failli se trouver mal en entrant dans le petit salon. Va la rejoindre. J’apporte de l’éther.

Il sortit, courut prendre un flacon dans sa chambre, et puis revint.