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Page:Maupassant - Fort comme la mort, Ollendorff, 1903.djvu/274

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fort comme la mort

— Je vous apporte quelque chose, dit-il.

Elle répondit :

― Alors nous en sommes décidément au « vous ».

Il prit un air paternel.

— Écoutez, mon enfant. Je suis au courant de l’événement qui se prépare. Je vous assure que cela sera indispensable dans quelque temps. Vaut mieux tout de suite que plus tard.

Elle haussa les épaules d’un air mécontent, tandis que la comtesse se taisait, le regard au loin et la pensée tendue.

Annette demanda :

— Que m’apportez-vous ?

Il annonça la représentation et les invitations qu’il comptait faire. Elle fut ravie, et, lui sautant au cou avec un élan de gamine, l’embrassa sur les deux joues.

Il se sentit défaillir et comprit, sous le double affleurement léger de cette petite bouche au souffle frais, qu’il ne se guérirait jamais.

La comtesse, crispée, dit à sa fille :

— Tu sais que ton père t’attend.

— Oui, maman, j’y vais.

Elle se sauva, en envoyant encore des baisers du bout des doigts.

Dès qu’elle fut sortie, Olivier demanda :

― Vont-ils voyager ?

— Oui, pendant trois mois.

Et il murmura, malgré lui :

— Tant mieux !

— Nous reprendrons notre ancienne vie, dit la comtesse.

Il balbutia :

— Je l’espère bien.