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Page:Maupassant - Fort comme la mort.djvu/283

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Maure où ils déjeunaient après le massage. Il s’habilla donc rapidement, espérant que l’étuve et la douche le calmeraient, et il sortit.

Dès qu’il eut mis le pied dehors, un froid vif le saisit, ce premier froid crispant de la première gelée qui détruit, en une seule nuit, les derniers restes de l’été.

Tout le long des boulevards, c’était une pluie épaisse de larges feuilles jaunes qui tombaient avec un bruit sec et menu. Elles tombaient, à perte de vue, d’un bout à l’autre des larges avenues entre les façades des maisons, comme si toutes les tiges venaient d’être séparées des branches par le tranchant d’une fine lame de glace. Les chaussées et les trottoirs en étaient déjà couverts, ressemblaient, pour quelques heures, aux allées des forêts au début de l’hiver. Tout ce feuillage mort crépitait sous les pas et s’amassait, par moments, en vagues légères, sous les poussées du vent.

C’était un de ces jours de transition qui sont la fin d’une saison et le commencement d’une autre, qui ont une saveur ou une tristesse spéciale, tristesse d’agonie ou saveur de sève qui renaît.

En franchissant le seuil du Bain Turc, la pensée de la chaleur dont il allait pénétrer sa chair après ce passage dans l’air glacé des rues fit tressaillir le cœur triste d’Olivier d’un frisson de satisfaction. Il se dévêtit avec prestesse, roula autour de sa