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Page:Monselet - Les Ressuscités, 1876.djvu/11

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M. DE JOUY

veste et demain en redingote. La littérature d’alors portait un carrick, celle d’aujourd’hui porte un paletot.

Ne nous moquons pas du carrick de M. de Jouy. Le carrick est un bon et honnête vêtement, très-ample et très-chaud. Et personne mieux que M. de Jouy ne savait porter le carrick. C’était un homme charmant en société, un oracle de goût, un modèle de galanterie, l’homme de son style en un mot. Sa plume avait des précautions inimaginables. Je dis précautions et non délicatesses, parce que la délicatesse même était dangereuse dans ce temps de censure irritée, ce qui rendait le métier d’écrivain fort difficile. Au régime des suspects politiques avait succédé le régime des suspects littéraires. On arrêtait, pour un hémistiche, les tragédies de Lemercier et les comédies d’Étienne. M. de Jouy fut à peu près le seul homme à succès de l’Empire. Il est vrai que l’empereur ne l’a jamais regardé comme un idéologue.

Je compare M. de Jouy à Marmontel, — le Zémire et Azor de la littérature.

Donnez un habit pailleté à M. de Jouy, et vous aurez Marmontel. Jetez un carrick sur