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Page:Monselet - Les Ressuscités, 1876.djvu/211

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GÉRARD DE NERVAL

affreuses errent dans mon cerveau, et souvent il me semble que le monde moral n’est régi que par une espèce de tyran, pareil à ce malheureux ! »

Le diable sourit, et tous deux vont en Angleterre. Ils aperçoivent sur les degrés du trône une sorte de monstre, bossu, tordu, sanglant, hautain ; ils reconnaissent en lui le protecteur du royaume, le duc de Glocester, qui sera bientôt Richard III ; ils pénètrent à la Tour et sont témoins de l’assassinat du jeune roi légitime et de son frère, qu’on enterre sous une dalle de cachot. Jamais Faust n’avait vu commettre de tels crimes avec autant de sang-froid ; il n’en veut pas voir davantage. Sur le point de s’embarquer, Léviathan lui dit avec une adorable insouciance : — « Au reste, en enfer, on ne fait pas grand cas de ces tristes insulaires, qui suceraient la moelle de tous les cadavres pestiférés du globe, s’ils croyaient trouver de l’or dans leurs os. Ce peuple, qui méprise les autres nations, se joue de tout ce que tu nommes sentiment, ne conclut aucun traité que dans l’intention de le rompre dès qu’il y a un terrain à gagner. Si les habitants de la terre ferme savaient se