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Page:Monselet - Les Ressuscités, 1876.djvu/309

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ÉDOUARD OURLIAC
laide qu’elle en a l’air ; dans mon ardeur de fuir l’auteur de mes jours, je ne l’avais pas remarquée. Et puis, je lui ai fait un certain effet, — je le crois bien ! — un beau front pâle, — de longs cheveux épars, — jeune poëte mourant !

Canelia, revenant. — Tenez, beau cousin, respirez.

Joséphin, feignant l’égarement. — Euh ! eh ! ah !… la muse passe avec une étoile au front ; elle pose ses pieds nus sur des nuages d’or… Canélia !

Canélia. — Il m’appelle ? Oh ! pauvre jeune homme !

Joséphin. — Canélia ! c’est toi que j’ai rêvée, c’est toi qui passes dans ma sombre nuit…

Canélia. — Il pense à moi. Joséphin !

Joséphin. — Laisse tes beaux chevaux pleuvoir sur mon front ; laisse tomber un baiser sur ma lèvre, comme une rosée sur la fleur flétrie.

Canélia. — On ne peut rien refuser à un malade. Souffrez-vous encore, mon cousin !

Joséphin. — Au contraire, belle cousine ; encore un baiser et j’irai à ravir.

Canélia. — Si mon oncle nous voyait… Finissez ! »

Joséphin ne finit pas, et l’oncle les voit ; il ne sait trop, cet oncle, s’il doit se fâcher ou rire, mais sa bonté l’emporte. De son côté, Joséphin prononce en ces termes son abdication poétique :

« Joséphin. — Je renonce à Satan, à ses pompes et à mes œuvres. Je n’ai pas dîné, je n’ai pas un sou,