Aller au contenu

Page:Monselet - Les Ressuscités, 1876.djvu/308

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
300
LES RESSUSCITÉS

vives, si folles et si brillantes dans leur immoralité !

Revenons au proverbe d’Edouard Ourliac, pour en dire la conclusion. Chassé par son père, Joséphin lui écrit une lettre :

« Je ne puis vivre éloigné de vous, mon père ; il ne me reste plus un liard. D’ailleurs, j’ai tout vu, tout usé, tout approfondi. Je suis las de la terre où l’on se crotte, des hommes à qui l’on doit de l’argent, des libraires qui n’en donnent pas, des maîtresses qui en demandent, des dîners à dix-huit sous, des bottes percées et des portiers. Vous m’avez donné la vie, père voluptueux et cruel, je vous la rends pour n’avoir rien à vous. Je prends donc la liberté de m’asphyxier sous la tonnelle de votre jardin. Réjouissez-vous : à trois heures très-précises votre polisson de fils aura cessé de vivre. »

On va au jardin, où on le trouve à demi renversé dans une posture vaporeuse. — Quelle tête volcanique ! s’écrie le père ; et il court après un docteur, laissant Joséphin en tête-à-tête avec Canélia, sa cousine.

« Canélia. — Pauvre cousin ! Tiens, il est gentil comme cela ; on dirait qu’il dort. Si je lui faisais respirer des sels ? (Elle va chercher un flacon,)

Joséphin, à part. — Qu’il est doux de voir ainsi planer au-dessus de soi un ange à la voix de femme, une blanche vision ! Au fait, cette enfant-là n’est pas si