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Page:Monselet - Les Ressuscités, 1876.djvu/313

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ÉDOUARD OURLIAC

justice à l’intérêt poignant qui domine dans Suzanne.

« M. Ourliac, dit-il, a l’entente des délicatesses de la femme. On sera content d’avoir lu un volume où l’on rencontre des scènes comme celles ou Suzanne ruinée, sans asile et sans pain, trouve de l’argent pour apporter des fleurs, dans deux pots de porcelaine, à la Reynie qui les casse ; comme celle où la Reynie, par un de ces éclairs de vigueur si fréquents chez les méridionaux, vient souper chez la cantatrice sans invitation, insulte les convives, compromet Suzanne, si chaste, si pure, et si belle jusque-là, et finit par devoir à cette lueur d’énergie qui simule l’amour, la récompense refusée à l’amour vrai de M. d’Haubertchamp. Ces deux scènes, entre autres, annoncent un vrai talent. Elles ne sont pas dans Diderot. »

Plus loin, M. de Balzac analyse le style d’Édouard Ourliac :

« À part quelques emmêlements dans le fil des idées, sa phrase est nette, vive, précise. M. Ourliac peut devenir un écrivain ; mais il n’a pas encore étudié le travail que demande la langue française, et dont les secrets sont surtout dans l’admirable prose de Charles Nodier. Il entasse imparfait sur imparfait pendant trois ou quatre pages, ce qui fatigue et l’œil et l’oreille et l’entendement ; quand il a trop de l’imparfait il se sert du verbe au prétérit. Il ne sait pas encore varier la forme de la phrase, il ignore les ciselures patientes que veulent les phrases incidentes et la manière de les grouper. Entre la force qui