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Page:Picard - Sabbat, 1923.djvu/11

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PRÉFACE



Je t’ai jetée à la prose, Hélène, avec regret et scrupules, et comme si j’attelais un pur sang à un tombereau. Humilier un col fier qui n’eut jamais que le rythme pour maître, contraindre à l’ornière toute droite des sabots ailés qui foulaient les nues… J’ai tremblé plus d’une fois de ce que j’osais…

J’ai de quoi trembler bien plus, maintenant que j’ai lu ton livre. Une sorcière est née, aussi lustrée de démonisme et neuve que le chat non encore léché. Elle se sait, de par la Poésie, fille de Satan. À peine surgie de sa nuit onctueuse et aveugle, elle parle et enseigne, et se souvient de tout ce qu’elle n’a pas connu. Elle dit cette grande parole, qui fume comme un fagot : « Il y a une certaine salivation de l’esprit qui ne peut être que démoniaque. Les poètes la connaissent particulièrement… »

Mieux que le connaître, ce Satan nécessaire à leur pur sabbat, ils sont assez grands pour l’inventer.