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Page:Picard - Sabbat, 1923.djvu/172

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SABBAT

doucement que la pluie qui tombe de la gouttière s’étonne, elle, pourtant, si pleine de langueur… « Je les tuerai… Je les tuerai », gémit-il. « Pourquoi ? » lui demande le vent humble, le vent honteux, le vent « parent pauvre » qui mendie un soliveau aux échoppes, un tour de valse à la girouette.

— « Pourquoi ? Parce qu’elles sont rousses, rousses, rousses, rousses… » Et ses yeux se remplissent de pleurs d’amour.

La femme du cordonnier a un grain de beauté ravissant comme un œil de souris, au coin du ventre. Malheur ! Le père impie ne cesse de penser que ses filles dont les vingt ans sentent la fleur et la chèvre, ont, aussi, un petit œil velouté, sombre et pensif, au coin de leur ventre de rousses… Et quand, à minuit, il se jette sur sa femme, comme un maudit, c’est qu’il songe avec trop de fureur au ventre des pucelles habité par l’œil de rongeur…

Dans la petite boutique de province, ce sont des scènes perpétuelles. Son Satan velu n’est pas commode. On dit, dans le peuple, qu’il « boit ». Ah ! ah ! Il est si sobre, cet homme, qu’un verre de vin, par jour, suffit à sa soif de cordonnier. Quant à sa soif de diable, c’est autre chose. Moi je sais que le delirium tremens ne quitte pas ce terrible alcoolique, mais comment soupçonnerait-on à quelles bouteilles flamboyantes ce diable s’empoisonne ?

Le bénitier qui règne au-dessus du chromo