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SABBAT

Simple comme un petit jupon rose qui sèche à l’air pur, harmonieuse comme la ruche dans sa solitude de lumière, parfaite comme le pain qui entre, chez nous, à l’heure où nous le souhaitons avec notre vie affamée et tendre, divine comme le rosier qui arrache, de sa poitrine éternelle, la rose qu’il faut à son matin, solide comme la belle maison dont les assises plongent dans les racines des chênes, fragile, légère, gracieuse comme les pampres ignorant qu’ils sont toute la joie, tout l’orgueil, toute la richesse de la vigne, heureuse comme la route nette qui part de la rivière et aboutit au clocher, musicale comme le collier de grelots qui danse au cou du chat joueur, éblouissante comme les quatre as qui sortent à la fois du cœur de la chance, fatidique comme le miroir qui, soudain, se brise sous le sourire qu’on enlumine de carmin, parfumée comme l’onguent que la Médicis dérobait au satanisme de l’empoisonneur, plus douce, plus douce, plus douce que la corde sourde qui délivre la sérénade dans les coupe-gorge de Grenade, et charmante… comme moi, si tu veux, telle fut notre première rencontre, cette première rencontre où je t’ai souri, tu sais bien… Cette première rencontre où j’ai commencé à te haïr…